EPIC, MAGAZINE EN LIGNE, FERME APRèS DIX ANS DE SERVICE

Reflet unique de la scène locale, la publication fermera fin juin après son millième article. Pilier de la rédaction, Clément Bourdin, 30 ans, raconte cette aventure bénévole.

Théâtre, cinéma, littérature, musique, arts visuels et arts vivants… Tout ou presque de ce que l’avant-garde locale a produit ces dix dernières années, principalement genevoise, également lausannoise dans une certaine mesure, a été chroniqué par EPIC.

EPIC, soit Espace de promotion pour l’imagination et la culture, a fêté en 2024 une décennie d’existence. Le magazine en ligne a publié son premier article en septembre 2014. Une décennie s’est écoulée depuis, qui a vu la petite équipe de rédacteurs et rédactrices accumuler une riche production éditoriale, offrant une fenêtre exhaustive sur la culture émergente.

Le premier roman, le premier disque, les premiers pas de l’artiste cherchant public, EPIC s’était donné pour mission de le défendre. Un exemple musical? Avant que les talents de Nnavy, Billy Bird ou Pekodjinn soient reconnus, EPIC en avait déjà parlé.

Cap fatidique

Mais l’aventure se termine. À la fin de ce mois de juin 2024, EPIC mettra un terme à ses activités. Basé uniquement sur le bénévolat, le média manque de collaborateurs. Pour les contributions rédactionnelles, en particulier pour l’administration de la structure. Une difficulté propre au monde associatif, lorsque nécessité il y a de renouveler les équipes. Dix ans, c’est, pour nombre d’associations, le cap fatidique. Pour EPIC, la fin d’un projet unique.

Fondé par quatre étudiants et étudiantes aujourd’hui trentenaires, le magazine a vu passer dans ses rangs une cinquantaine de contributeurs, les derniers arrivés âgés d’une vingtaine d’années. Au fil de cette décennie, les plus investis auront proposé jusqu’à une centaine de sujets, d’autres se seront limités à une incursion éclair.

Rédaction nomade

C’est entre 2016 et 2022 que le magazine en ligne a battu son plein, traversant le Covid malgré l’absence de représentations culturelles publiques, ceci en proposant des formats novateurs, notamment ses «Lectures sur canapés», des recommandations littéraires, ou ses playlists de musiciens du cru. «L’équipe se retrouvait régulièrement, nous étions amis.»

On retient la crêperie des Grottes, longtemps point de rendez-vous de cette rédaction nomade, qui se réunissait à ses débuts dans le local de répétition d’un des fondateurs, à Lancy. «Trouver une espace de travail fixe, et abordable, s’est avéré compliqué. Notre qualité d’association multidisciplinaire ne convenait pas aux critères des aides publiques.»

Aux grandes heures, ils étaient une douzaine à la barre. Ils ne sont plus que six aujourd’hui. Dont Clément Bourdin, né en 1994, collaborateur depuis 2015. Il a étudié les sciences politiques avant de se former au management public. La rubrique locale de la «Tribune de Genève» l’a accueilli jadis comme stagiaire. Le FIFDH l’engagera comme assistant de la directrice. Désormais employé par un bureau d’évaluation des politiques publiques, Clément Bourdin continue de présider le comité d’EPIC, de relire les articles, de gérer les partenariats, etc. Jusqu’à la fin.

Salaire symbolique

«On a atteint près d’un millier d’articles en dix ans. Une centaine chaque année, à raison d’une publication tous les deux ou trois jours.» Clément Bourdin d’ajouter, non sans une certaine tristesse mais avec détermination: «EPIC s’arrêtera fin juin. D'ici là, je compte bien publier le millième article. J’aime les chiffres ronds. Il y en a 993 actuellement.» Le lendemain de notre entrevue, Clément Bourdin signait déjà le 994e sujet, consacré au rappeur genevois Monkey Dola.

«Hormis la maintenance du site, qui ne coûtait guère que 400 ou 500 francs par an, nous avons établi des partenariats avec des institutions culturelles telles que Le Poche, le Théâtre Saint-Gervais, Le Galpon, Les Créatives ou la buvette A la Pointe. Ce sont les seules publicités que nous avons acceptées.» Total? «Le budget annuel d’EPIC n’a jamais dépassé 1000 francs.» Quant aux subventions, leur cumul sur dix ans atteindra au mieux les 10’000 francs.

Que dire encore de l’audience? Actuellement, EPIC attire entre 300 et 400 visiteurs quotidiens. Contre 600 en 2022 encore, lorsque la plateforme publiait plusieurs articles chaque semaine. Clément Bourdin, enfin, d’évoquer ce salaire purement symbolique qui gratifiait les rédacteurs et rédactrices du magazine. «Savoir que nous légitimions par nos articles la démarche d’un ou d’une artiste, et recevoir en retour ses mots de remerciement, c’était cela notre satisfaction.» EPIC comblait un créneau nécessaire à la culture locale. Il est à nouveau à prendre.

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