Bernard Pallot avait reconnu avoir étranglé son épouse, assurant qu'il s'agissait d'une «euthanasie».
«Je ne suis pas un assassin»: Bernard Pallot, 78 ans, a été acquitté mercredi à Troyes où il était jugé depuis lundi pour l’assassinat de son épouse Suzanne, malade, qu’il reconnait avoir étranglée pour qu'elle ne souffre plus.
«Ce procès témoigne de l’insuffisance de la loi qui nous met dans des situations, nous les particuliers, difficiles, et même la justice puisqu’ils ne savent pas comment composer avec la loi actuelle», a réagi Bernard Pallot à l’issue du verdict.
«Il faut absolument que la loi évolue. On est dans le pays des droits de l’homme normalement», a-t-il ajouté.
Le 11 octobre 2021, ce professeur en IUT à la retraite au casier judiciaire vierge injecte du cyanure dans la cuisse de son épouse, dont la vie n’était selon lui «plus supportable», pour la tuer, sans y parvenir.
Alors, «dans l’improvisation», il s’empare d’un morceau de fil électrique dans le garage de leur domicile d’Isle-Aumont (Aube) qu’il lui serre autour du cou pendant une vingtaine de minutes. «Ca paraît un peu sauvage comme méthode, mais je n’avais pas le choix», a-t-il dit lors de l’enquête.
«Elle est là, je l’ai étranglée»
À l’arrivée des gendarmes, l’ingénieur de formation déclare: «C’est moi qui ai tué ma femme. Elle est là, je l’ai étranglée». Il affirme avoir agi «par amour» et «à sa demande» pour «éviter qu’elle souffre».
Mais pour l’avocat général, Mickaël Le Nouy, cet assassinat, «présenté comme un geste d’amour, est un geste interdit par la loi» et «on ne peut pas s’arroger le droit de tuer».
Bernard Pallot, jugé depuis lundi devant la cour d’assises de l’Aube, «a agi de façon déterminée, froide et violente», avait estimé l’avocat général, décrivant une mort «sauvage» et «brutale». Il avait requis huit ans de prison.
«L’argument de l’euthanasie est inopérant en droit pénal», avait-il insisté lors de ses réquisitions, tout en estimant qu’un retour en prison n’était «pas adapté» pour le septuagénaire.
Maladie de Carrington
La défense avait fait citer Olivier Falorni, rapporteur général du projet de loi sur la fin de vie dont l’examen a été suspendu par la dissolution de l’Assemblée, mais il ne s’est pas présenté, ne souhaitant pas «faire pression sur la cour», a regretté l’avocat de l’accusé, Frédéric Verra.
Si l’euthanasie était légale, «Bernard Pallot n’aurait pas étranglé sa femme avec un fil électrique», a plaidé l’avocat.
Suzanne Pallot, également septuagénaire, souffrait de plusieurs pathologies, notamment de la maladie de Carrington, une pneumopathie chronique, et d’ostéoporose, avec des fractures multiples, dont une du col du fémur intervenue peu de temps avant les faits.
Lors d’un interrogatoire, Bernard Pallot a affirmé qu’il s’agissait pour lui d’une «euthanasie» demandée par son épouse, avec qui il était marié depuis 1969.
Le retraité affirme mesurer la gravité de son acte «vis-à-vis des lois de la République» mais estime avoir «tenu ses promesses» vis-à-vis de son épouse.
«On le fait pour les animaux»
Selon lui, Suzanne, dont il s’occupait au quotidien, ne voulait pas retourner à l’hôpital où elle se sentait «mal entourée».
Lors de l’enquête, l’analyse de l’ordinateur du couple a fait apparaître des recherches au cours de l’année 2021 en lien avec le suicide et l’euthanasie dont «suicide au cyanure».
À un ami, l’accusé dira: «En France on ne peut pas euthanasier les gens qui souffrent, mais on le fait pour les animaux».
Dans le cadre de l’enquête, un expert psychologue a décrit une forme de soumission de Bernard Pallot à l’égard de sa femme, qu’il n’osait pas contredire ou raisonner. «Il a fait ce qu’elle voulait et pas ce qu’il voulait», a estimé un expert psychologue devant la cour mercredi.
Le jour de sa mort, Suzanne a dit adieu à son fils unique au téléphone. Devant le juge d’instruction, leur fils a déclaré que son père avait assassiné sa mère «par amour, par compassion».
Près du corps de Suzanne, un mot a été trouvé: «Je soussignée, Pallot Suzanne, encore saine d’esprit, demande à mon mari, Bernard Pallot, de me soulager définitivement des souffrances incurables que je supporte».
«Je ne suis pas un assassin, si je suis condamné, on aura confondu l’amour et la haine», avait déclaré l’accusé avant que la cour se retire pour décider de son sort.
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