LA SUISSE ET NEMO PEUVENT-ILS SE SABORDER?

Le candidat biennois est un des favoris des sondages du concours de la chanson. Mais une victoire samedi ne ferait pas plaisir à tout le monde.

La Suisse n'a plus été aussi proche de remporter l'Eurovision depuis presque quarante ans et le sacre de Céline Dion en 1988. Les chances de voir Nemo avec sa chanson «The Code» ressortir vainqueur des votes le samedi 11 mai à Malmö, en Suède, sont en effet bien réelles, selon les bookmakers. Et donc, pour la SSR, d'organiser le plus grand concours de la chanson au monde chez nous, en 2025.

Une perspective qui ne fait pas plaisir à tout le monde. Le service public devrait dépenser plusieurs millions pour accueillir l'événement, alors que le peuple votera prochainement sur une initiative visant à diminuer le coût de la redevance radio et télévision. Pour les milieux conservateurs, «l'Eurovision s'est transformé en un vecteur de promotion pour des idéologies mondialistes ou progressistes» (extrait d'une interpellation déposée par l'UDC valaisan Jean-Luc Addor en 2019).

Mais l'idée ici n'est pas d'avancer les sommes qui seraient mises sur la table — et les bénéfices qu'une ville pourrait en tirer. Nous avons voulu savoir si des gens haut placés pouvaient convaincre Nemo de foirer sa prestation, si les votes pouvaient être truqués. Pour éviter d'organiser l'Eurovision, la Suisse peut-elle saboter ses chances de gagner, le moment venu?

Le travail accompli

«La délégation fait tout pour gagner, assure Jean-Marc Richard, qui commentera pour la 31e fois l'Eurovision à la RTS. Personne à la SSR ne cherche à perdre. Pas après tout ce qui a été fait, l'immense boulot qui a été réalisé ces dernières années.»

En 2019, un nouveau processus de sélection interne a, en effet, été introduit. Les chansons sont évaluées par un jury d'experts nationaux et internationaux et par un jury du public, un peu comme à l'Eurovision. «Ce processus a permis à la Suisse de renouer avec le succès ces dernières années, et c'est une évolution formidable», explique Yves Schifferle, le chef de la délégation suisse, qui, à quelques heures du grand soir, ne veut plus commenter davantage une éventuelle victoire.

«Légendes urbaines»

Dans l'histoire de l'Eurovision, il y a pourtant des zones d'ombre. Comme en 2003, lorsque le jury belge est accusé d'avoir truqué les votes et donné 12 points à la Turquie pour ne pas avoir à organiser le Concours. L'an dernier, un ancien patron de France 2 révélait avoir «pour ordre de perdre» lorsqu’il était directeur de l'unité variétés, jeux et divertissements de la chaîne publique à la fin des années 90.

«Des légendes urbaines, selon Nicolas Tanner, consultant sur la RTS et co-auteur de l'ouvrage «La saga Eurovision» (Éditions Favre, 2017). Tout est sous le contrôle d'un huissier de justice.» Et d'expliquer que si les télévisions n'ont pas les moyens d'organiser une édition, elles ne participent pas à l'Eurovision. C'est d'ailleurs le cas cette année de nombreux pays balkaniques.

Mauvaises décisions

Nicolas Tanner pense que c'est en devenant favorites que des délégations ont pris des mauvaises décisions. Il cite la Suisse avec DJ Bobo, très bien placé chez les bookmakers avant la demi-finale en 2007. «Sa prestation live était un mauvais choix.»

Au sujet de Nemo et de la victoire finale, le spécialiste prévient, cependant: «Les pronostics n'ont jamais été aussi serrés.» Jean-Marc Richard abonde: «Ce sera compliqué de remporter le vote du public. La Suisse n'a pas de communautés à l'étranger. La Suisse sera dans les trois ou quatre premiers, mais ce n'est pas encore gagné.»

Rappelons qu'avant la grande soirée de samedi, Nemo doit tout de même se qualifier lors de la seconde demi-finale, jeudi (à suivre en live sur lematin.ch). Ce qui ne devrait être qu'une formalité.

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