PROCèS DES VIOLS DE MAZAN: LA DIFFUSION INéVITABLE DES VIDéOS

Gisèle Pelicot explique ce qui lui importe le plus lorsque les sequences seront utilisées.

Au procès des viols en série de Mazan, l’examen des faits reprochés aux 51 coacccusés rend nécessaire la diffusion de vidéos, éléments de preuve cruciaux. La victime, Gisèle Pelicot, y est prête, mais le processus est très encadré.

Deux premières photos, servant à témoigner des faits de viol commis sur Gisèle Pelicot entre 2011 et 2020, doivent être diffusées à l’audience mercredi après-midi à la demande d’avocats de la défense.

«Ce qui m’importe c’est que ces vidéos (et photos) qui sont une preuve irréfutable des viols et violences que j’ai subies soient diffusées uniquement dans cette salle», a demandé Gisèle Pelicot à la barre, ajoutant qu’elle «ne souhaite pas que le public soit informé de ces images». Le 9 septembre, elle avait déjà demandé à ce que ses enfants «n’assistent pas» à ce visionnage.

La retransmission sera coupée au public

Si le huis clos a été refusé dès le premier jour du procès, le 2 septembre, par Gisèle et ses trois enfants, les débats ne seront pas totalement publics pour autant, avait averti le président de la cour criminelle de Vaucluse, à Avignon.

«S’il y a diffusion d’images compromettantes, exposant la nudité d’une personne», la retransmission dans la salle annexe, réservée au public, sera coupée, avait précisé Roger Arata, soulignant notamment que des élèves suivent parfois ce procès.

C’est en évoquant ces vidéos, minutieusement archivées par Dominique Pelicot, qui durant dix ans a drogué son épouse avec des anxiolytiques afin de la violer, inconsciente, et de la faire violer par des dizaines d’hommes invités sur internet, que le parquet avait requis le huis clos. Sans succès.

«Les débats nous conduiront longuement à examiner ces faits dans le détail, et, à notre sens, des vidéos seront nécessairement visionnées», avait estimé l’avocat général Jean-François Mayet.

«Les vidéos vont parler»

«Non seulement la publicité des débats serait dangereuse, mais elle porterait gravement atteinte à la dignité des personnes», et notamment à celle de Mme Pelicot, avait-il argumenté.

«Il y a donc nécessité à notre sens d’éviter un retentissement trop large», avait poursuivi le magistrat, faisant notamment référence à la Cour européenne des droits de l"Homme qui protège l’intimité des victimes en cas d’images dégradantes.

Aucun membre du public ne devrait pouvoir assister à la diffusion des images, la salle principale de ce procès emblématique de la question des viols sous soumission chimique, étant réservée aux juges, aux parties civiles, aux accusés – dont 32 comparaissent libres -, à leurs avocats et à quelques journalistes.

Des conditions qui devraient satisfaire les avocats de la défense des 50 coaccusés (en plus de M. Pelicot), qui avaient demandé que ce procès ne devienne pas «un spectacle».

Paradoxalement, la défense de M. Pelicot, principal accusé, avait plaidé pour la diffusion des images, estimant qu’elles mettraient à mal l’argumentation de certains des hommes de 26 à 74 ans qui nient tout viol et maintiennent avoir cru participer au scenario d’un couple libertin dans lequel Mme Pelicot simulait le sommeil et était consentante.

«L’horreur d’un viol»

«Quand les vidéos vont parler, elles vont parler. C’est-à-dire qu’on ne peut pas entendre qu’il ne s’agit pas de scènes de viols», avait déclaré à la presse l’avocate de M. Pelicot, Me Béatrice Zavarro, début septembre.

Si Dominique Pelicot a encore répété mardi qu’il reconnaissait l’intégralité des faits, seuls 13 de ses coaccusés ont fait de même, admettant les viols aggravés pour lesquels ils encourent 20 ans de réclusion criminelle.

Pour Gisèle Pelicot, la diffusion de ces vidéos sera un nouveau cauchemar. Elle a confié n’avoir eu la force de les regarder une première fois qu’en mai 2024, trois ans et demi après le début de l’enquête et de l’effondrement de son monde.

«Même si il y aura des moments extrêmement difficiles, elle n’a pas à se cacher, et elle n’a pas à avoir honte de ce qu’elle a vécu (...), la honte doit changer de camp», avait déclaré Stéphane Babonneau, l’un de ses deux avocats, pour expliquer le choix d’un procès public.

Mme Pelicot sait que «la publicité qu’elle a autorisée pour ces débats permettra de voir ce que c’est que la crudité et l’horreur d’un viol», a insisté auprès de l’AFP Me Antoine Camus, son autre avocat.

«Ces vidéos sont insoutenables, il y a une volonté de l’avilir», a-t-il ajouté.

Mais pour lui, c’est grâce au visionnage de ces images que les coaccusés de Dominique Pelicot devront admettre la vérité: «On va le faire une fois, deux fois, j’espère que nous n’aurons pas à le faire 40 fois, mais elle y est prête. Mais j’espère que cinq-six fois pourront suffire pour un cerveau normalement constitué.»

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