UN ROMAN BALZACIEN SUR UNE «SCANDALEUSE» DES ANNéES 20

Dans «Une saison à Montparnasse», le Franco-Suisse Colin Thibert raconte l’histoire d’une provinciale rangée qui découvre la liberté et son penchant pour les femmes à Paris.

Parmi les ouvrages qu’il a lus ou relus, le romancier franco-suisse Colin Thibert, de son vrai nom Léon Noël, ne cite pas à la fin de son roman un seul livre d’Honoré de Balzac. Pourtant, son dernier roman, «Une saison à Montparnasse», est balzacien à plus d’un titre. Jugez plutôt: l’histoire est celle de Gabrielle Bertholon, fille d’une famille de soyeux lyonnais, qui profite des plaisirs de la capitale, loin des convenances bourgeoises de province et entreprend de devenir peintre.

Ce Lucien de Rubempré au féminin connaît une ascension, la chute et la résurrection. L’auteur dresse avec elle le portrait d’une femme libre, qui découvre son penchant pour les amours homosexuelles, se confronte à la différence de milieu social en aimant Marcelle, de modeste origine et volontiers frondeuse. Très balzacien, encore. Colin Thibert croque avec justesse quelques-uns des personnages de cette Comédie humaine, en épargnant son lecteur des longues descriptions de l’auteur des Illusions perdues.

Une recherche familiale à Neuchâtel

La concierge Madame Ernest, l’abbé Migeaud, le conseiller des frères Bertholon, le notaire, le professeur de dessin, le détective, les admirateurs de la belle: cet aréopage est comme chez Balzac obsédé par la morale et la transgression, intéressé par l’argent et parfois victime de leur cupidité (le krach de 1929), ambitieux et entravés par leurs origines ou d’esprit étriqué.

Né à Neuchâtel, l’auteur a trouvé matière à son roman en s’intéressant à son grand-père maternel, qui fut directeur de l’asile de Préfargier (canton de Neuchâtel) dans les années 20, précisément celles du livre. Il a aussi pensé à la sœur cadette du psychiatre, restée vieille fille, comme on le disait à l’époque. Or, une partie du livre a pour décor une maison de santé du canton de Neuchâtel, censée guérir Gabrielle de son saphisme.

Peinture de mœurs, du Montparnasse des années 20 et incursions en Suisse, intrigue à rebondissements concernant le sort de la scandaleuse, «Une saison à Montparnasse» se lit avec plaisir, mélangeant une thématique d’aujourd’hui à une écriture plutôt classique qui se permet quelques écarts de langage plus contemporains.

«Une saison à Montparnasse», Colin Thibert, Éd. Héloïse d’Ormesson, 269 p. mars 2024, de 27 fr. 99 à 31 fr. 10.

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